Vous voulez « en jeter » en exposition, sur un cynodrome ou lors d’une PVL, ou tout simplement lorsque vous promenez votre deerhound en ville ? Alors je ne saurais trop vous recommander de porter la glorieuse tenue nationale écossaise.
Bien évidemment, c’est aux messieurs que je m’adresse. Le kilt n’est pas une jupe. C’est un vêtement exclusivement masculin. Pour les dames, il existe des jupes « kiltées » en tartan, longues ou courtes, mais qui n’ont qu’un très lointain rapport avec le vêtement dont il est question ici.
Avant de détailler la tenue, il est bon de souligner deux points non négligeables. Tout d’abord, la décision de porter le kilt ne se prend pas facilement. Certains hom- mes à la virilité mal placée hésitent avant de franchir le pas. Vaincre ses préjugés prend du temps. Une fois que c’est fait, on se rend compte que cette décision soulève l’admiration de son entourage. On se dit alors qu’il faut « en » avoir pour porter la tenue des Hautes Terres.
Ensuite, et plus prosaïquement, il est autre chose qu’il faut avoir pour porter le kilt, c’est-à-dire les moyens de se l’offrir. Le kilt seul coûte environ 500 €, et il faudra compter de 1 000 à 1 300 € pour la panoplie complète. Car le fait de porter le kilt impose de changer toute la tenue, des chaussures au couvre-chef.
La décision étant prise, et les finances le permettant, voici le détail de tout ce qui compose le costume national écossais.
Si vous le voulez, nous allons décrire les éléments dans l’ordre où on les met, en distinguant entre la tenue de ville et la tenue de soirée :
• chemise : en tenue de ville, la chemise est d’une couleur unie au choix (beige, bleue, verte, grise...). elle est blanche et à boutons non apparents en tenue de soirée.
• kilt hose (chaussettes) : épaisses, en laine, de la couleur de la chemise en tenue de ville, blanches en tenue de soirée. elles montent jusqu’au bas du genou.
• garter flashes (jarretières) : il s’agit d’un élastique duquel pendent deux rubans que l’on attache sous chaque genou. La chaus- sette est ensuite repliée pour dissimuler l’élastique tout en laissant apparaître les rubans. Les jarretières sont de la couleur de la chemise et des chaussettes en tenue de ville, rouges en tenue de soirée.
• ghillie brogues (chaussures) : noires, vernies, dans le pur style « anglaises à trou- trous ». elles ont la particularité d’être sans languette et d’être équipées de lacets très longs que l’on noue selon un schéma compliqué autour de la cheville. c’est, avec le kilt, le seul élément de la tenue qui soit commun aux tenues de ville et de soirée.
• sgian dubh (couteau) : il se glisse avec son fourreau dans la chaussette droite, à l’extérieur du mollet. Le haut s’orne d’une pierre taillée. Il est à manche de corne en tenue de ville, à manche noir ou métallique en tenue de soirée. Sur la voie publique, il vaut mieux porter un faux sgian dubh à lame de plastique, ou carrément l’enlever, pour éviter les ennuis avec la législation sur le port d’armes. Le port du sgian dubh trouve son origine à l’époque où les chemins n’étaient pas sûrs et où il était de rigueur d’être armé. Lorsqu’on entrait dans une maison, il était de bon ton de mettre ce couteau à un endroit visible (dans la chaussette) de façon à prouver ses bonnes intentions.
• kilt : il est entièrement confectionné à la main, sur mesure, à partir d’une pièce de laine de 7,30 m, et pèse 3 kg. ceci permet de couper court à une inquiétude quant au port du kilt par temps froid. entre les chaus- settes qui remontent jusqu’au bas de la rotule et le kilt qui s’arrête en haut du genou, cela ne laisse exposé aux rigueurs hivernales qu’un « petit morceau » surtout composé de peau et d’os, donc peu sensible au froid. d’ailleurs, pour finir de vous rassurer, je rappelle que l’écosse est plutôt un pays froid.
On met le kilt en commençant par le tablier du dessous sur le haut de la hanche gauche, puis on l’enroule dans le sens des aiguilles d’une montre autour de la taille jusqu’au tablier du dessus, lequel s’arrête sur la hanche droite (un tour et demi). Il ne le reste plus qu’à le serrer au moyen des courroies de cuir qui sont aux extrémités. L’arrière comporte vingt-sept plis qui laissent apparaître le motif du tartan. tous les tartans n’ayant pas la même largeur de motif, vous imaginez la difficulté que cela représente pour la couturière.
Ici se pose la question du choix du tartan, c’est-à-dire de la « couleur » de votre kilt. Comme il en existe des centaines, des précisions s’imposent. À l’exception du Royal Stewart dont le port au Royaume Uni est soumis à l’autorisation du souverain (rien que ça !), tous les tartans sont en « port libre ». Toutefois, il est de bon ton de ne porter le tartan d’un clan qu’après avoir été autorisé à le faire par un membre de ce clan. Cette autorisation n’est en principe jamais refusée. Sinon, on peut se rabattre sur le tartan d’une ville ou d’une région, ou encore un tartan commémoratif.
Une fois le tartan sélectionné, il faut choisir entre les couleurs « anciennes » et les couleurs « modernes ». Si le tartan est à dominante bleue ou verte, je conseille les couleurs anciennes. En couleurs modernes, votre kilt semblerait presque noir. Si le tartan est à dominante jaune ou rouge, il faut savoir que ces teintes sont beaucoup plus vives en couleurs modernes.
• kilt pin (épingle décorative) dont le but est de garantir la fermeture du bas de votre kilt et qui se porte par conséquent au bas de la cuisse droite. Son port est obligatoire... en Angleterre (mais pas en écosse)! c’est pour cela que, par principe, je n’en mets pas ! en tout état de cause, il faut éviter de la mettre au travers des deux tabliers, bien que ce soit sa vocation première. Vous risqueriez en cas de mouvement brusque de déchirer le tissu de votre kilt.
• sporran : c’est la petite bourse que l’on porte devant le kilt, car celui-ci n’a pas de poches ! On l’attache au moyen d’une ceinture étroite munie de deux petites chaînes. en tenue de ville, le sporran est en cuir. en tenue de soirée, il est en fourrure et orné d’un large fermoir métallique.
• ceinture : large, avec une boucle représentant généralement les armes du clan. On ne la porte qu’en tenue de ville.
• veste : très courte car elle arrive juste en 15
haut du kilt, au niveau du nombril. elle est en tweed et de la même couleur que la chemise en tenue de ville. en tenue de soirée, la veste « prince charlie » est noire, à queue-de-pie, ornée d’épaulettes et de vingt-deux boutons métalliques, mais sans la moindre boutonnière ! Les seuls boutons que l’on ferme sont les trois du gilet noir porté sous la veste.
• cravate : dans le même tartan que le kilt en tenue de ville. en tenue de soirée, elle est remplacée par un nœud papillon noir ou rouge.
• plaid : c’est d’un carré de tartan que l’on porte uniquement en tenue de soirée, fixé à l’épaule gauche, par une large broche. Il rappelle l’époque ou le kilt était une grande couverture que l’on attachait à la taille avec une ceinture et dont la moitié supérieure était rejetée sur l’épaule.
• balmoral (béret) en tenue de ville, dont les rubans sont attachés en nœud papillon, ou glengarry (calot) en tenue de soirée, dont les rubans pendent librement. L’un et l’autre s’ornent au-dessus de l’oreille gauche des armes du clan.
Vous voilà prêt et tout beau pour faire honneur à la race de votre deerhound !
Laurent Lechifflart pour Presse de Deers (n° 23)
NB : je n’ai volontairement rien dit de ce qui se porte (ou ne se porte pas) sous le kilt. Il faut bien vous laisser de quoi discuter dans vos chaumières!