1899 (Coll MLR pour Deerhounds pour les bleus)
Le deerhound ou lévrier d'Écosse.
Lévrier écossais, deerhound, staghound désignent le même animal, et ces expressions ont été employées indifféremment par plusieurs auteurs, à tort en ce qui regarde le Staghound, qui est un chien
courant d'équipage pour le cerf.
Deerhound et staghound ont été mis, par ces auteurs, en tête de classifications dont les détails sont devenus diffus à force d'être subtils.
Le lévrier d'Écosse - qu'il ne faut pas confondre avec le greyhound d'Écosse que nous verrons plus loin - est, avec celui d'Albanie, un des plus beaux spécimens de la race canine.
Il est employé en meute dans les grandes chasses à courre de l'Angleterre, de l'Allemagne et de la Russie. Il sert principalement à la poursuite du gros gibier déjà blessé. Les individus de la
race pure sont devenus rares, même en Angleterre; on ne les retrouve guère que dans le Highland de l'Écosse, dans les montagnes du haut pays.
Les chenils du château de Balmoral, résidence d'été de la reine Victoria, contiennent de très beaux sujets appartenant au prince de Galles; mais je ne pense pas que le prince les emploie à la
chasse.
Quelques auteurs, ai-je dit, ont établi une distinction entre le « lévrier d'Écosse» et le deerhound (chien à daims). Pour eux ce deerhound et le staghound, d'un autre côté ne sont qu'un même
animal.
« Le lévrier d'Écosse, nous disent ces auteurs, est identique de formes et d'habitudes au pur lévrier à daims; il n'en diffère qu'en ce que ce dernier porte la tête plus haute que le lévrier
écossais, lorsqu'il est en chasse, parce qu'il prend cette attitude pour porter bas son gibier, le lièvre. »
Voilà certes une différence de race établie d'une façon aussi spécieuse qu'embrouillée.
Le lévrier d'Écosse et le deerhound sont pour moi un même animal. La seule différence qui peut exister entre les deux ne gît que dans la force et l'épaisseur musculaires, supérieures chez le
lévrier d'Écosse proprement dit. Et cette différence même ne peut être considérée comme générique, attendu qu'elle est le résultat de l'entraînement et de l'éducation.
Dans les montagnes sauvages du haut pays, du Highland, le lévrier est employé à la chasse du cerf qui y est d'une force considérable; plus au midi, sur les frontières d'Angleterre, vers le
Cumberland et le Westmoreland, dans les forêts à daims (deer forests) la chasse est moins dure, plus civilisée.
Les rudes highlanders possèdent et élèvent un lévrier qui devient généralement plus puissant que le même animal du law-land, du bas pays.
Les lévriers d'Écosse ont le poil rude et fourni, plus dur et plus serré vers les joues et le museau que dans les autres parties du corps; c'est, du reste, à cette particularité que l'on
reconnaît le plus ou moins de pureté de la race.
La couleur de la robe varie du gris de fer - la plus estimée - au fauve roux, en passant par le taché gris et jaune, ou blanc et noir. La tête est petite, le haut du crâne élevé et pointu; les
oreilles sont droites, avec l'extrême pointe retombant ; l'œil, brun clair, est d'une vivacité extraordinaire, mais le regard est bon et doux. La queue est longue, légèrement cambrée à son
extrémité et garnie de poils relativement courts.
Très passionnés pour la chasse, ces lévriers sont de vaillantes bêtes, douées d'un courage et d'une intelligence remarquables, comme l'indique suffisamment du reste la forme de la boîte
cervicale. Dans les montagnes d'Écosse, il serait impossible de les remplacer par d'autres chiens de chasse.
Le lévrier écossais a le nerf olfactif développé, et il suit parfaitement, sans défaut, une piste froide. En chasse, ils peuvent prendre rang comme les plus rapides et en même temps les plus durs
à la fatigue. On en a vu tenir un cerf sans faiblesse et le porter bas après une course de plus de 80 kilomètres.
Une ancienne chronique de sports mentionne les incidents d'une chasse avec ces lévriers, qui fut tellement menée par l'animal de chasse que tous les chiens de la meute, moins deux, étaient tombés
harassés le long de la voie. Lorsque les chasseurs rejoignirent les deux chiens restants, ils les trouvèrent expirants près du corps du cerf mort lui-même de fatigue.
La taille du lévrier d'Écosse varie de 76 à 80 et même à 90 centimètres. La longueur, de l'épaule à la vertèbre caudale, est de 1 m, 10 en général.
Le célèbre peintre d'animaux Sir Edwin Landseer était un grand amateur de ces chiens; plusieurs de ses plus belles toiles ont pour personnages principaux des lévriers écossais, chassant dans les
montagnes du highland, au sommet des pics neigeux, accompagnés de piqueurs vêtus du costume pittoresque des highlanders.
Walter Scott aimait beaucoup le deerhound: il était toujours suivi de quelques-uns de ces beaux animaux, et il a pris grand soin, dans plusieurs de ses romans, Guy Mannering, Waverley, The
Monastery, de combattre le préjugé établi contre leur intelligence et leurs instincts d'affection.
La plupart des auteurs anglais qui ont écrit sur le chien attribuent l'origine du lévrier d'Écosse au croisement du pur lévrier anglais à poil ras, avec une lice de Saint-Hubert noire ou greffier
du roi. De là, disent-ils, le nez exquis réuni à la vitesse. Mais d'où viendrait alors le poil long et rude ? De l'influence du climat froid et brumeux.
Dans l'Angleterre proprement dite, le déboisement et le défrichement des forêts n'ont plus permis la conservation du grand gibier, et la chasse au cerf a presque totalement fait place à celle du
renard.
Même dans certains des domaines royaux, où l'ancien sport du stag-chasing est encore en honneur, on emploie des meutes composées de limiers de forte taille, qui sont des foxhounds très doublés et
qui ont pris le nom donné aux lévriers écossais: staghounds.
Du reste, cette chasse au cerf, en Angleterre, est devenue presque totalement artificielle. On amène, au rendez-vous de chasse, un superbe dix-cors, ou quelque belle troisième ou quatrième tête
dans une boîte ad hoc, et on débouche, presque au nez des chiens. Souvent l'animal échappe à la meute; on cite un cerf, dans le domaine de Windsor, qui a été comme cela lancé une douzaine de fois
et à qui on a fini par donner des invalides bien mérités, dans le parc du château.